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    Chapitre 1
    Shadurikiam, me voilà!

      La lourde porte de bois se ferma lentement et Jamina la contempla en poussant un long soupir. Une nouvelle journée commençait pour la jeune Pixie et le soleil avait décidé de manifester sa présence rayonnante. L'air était doux et sec et se remplissait vite de l'odeur des étals du marché non loin, tandis que les commerçants finissaient de disposer fruits, légumes, fleurs et produits exotiques et servaient leurs premiers clients. Jamina tourna le dos à sa maison et regarda autour d'elle pensivement. De jeunes Pixies allaient à l'école main dans la main en riant, les artisans, commerçants  et autres travailleurs vaquaient à leurs activités quotidiennes, les premiers promeneurs matinaux sortaient de chez eux... Lilpour était en train de s'éveiller et s'apprêtait à vivre ce jour. Jamina était bien dans cette ville, la plus importante de tout le pays, sans doute la plus belle aussi. Une oasis de beauté bâtie en plein coeur d 'un désert inhospitalier mais qui offrait des havres de paix à qui savait les dénicher. Une citadelle aussi, protégée des vents du désert par d'épaisses murailles qui entouraient la ville basse comme la ville haute. Jamina s'était toujours étonnée de la présence de telles protections, car jamais elle n'avait entendu parler d'une quelconque attaque de la ville. Elle savait toutefois que le monde était vaste et qu'elle en savait peu de choses. Mais elle vivait dans la capitale et tout ce qu'il fallait à une Pixie pour être heureuse se trouvait en ville, pourquoi irait-elle donc chercher à se renseigner sur ce qui se passait à l'extérieur?
     Les Pixies étaient de petites créatures ailées, semblables à des humains. Elles vivaient en société organisée et leurs ailes ainsi que la magie qu'elles utilisaient au quotidien étaient les seules choses qui les différenciaient des humains, ajoutées bien sûr au fait qu'ils ne vivaient pas non plus dans le même monde. Jamais un humain ne pourrait pénétrer dans le monde des Pixies, en revanche, les Pixies se rendaient régulièrement dans le monde des humains sans que ceux-ci ne l'apprirent. Ou plus exactement, les Pixies autorisées le faisaient, ce qui excluait, pour l'heure, Jamina.
     Sur une échelle de temps humaine, Jamina avait environ quatorze ans mais pour les Pixies, cela faisait environ cinquante ans. La jeune Pixie était une jolie créature douce et patiente mais qui manquait d'assurance. Ses longs cheveux noirs caractéristiques de Lilpour étaient toujours relevés et ses habits blancs contrastaient avec sa peau bronzée. Jamina portait toujours des tenues pratiques pour affronter des journées dans la ville du désert, petit t-shirt, sarouel et souvent, un sari rouge recouvrait le tout. Quand elle n'allait pas pieds nus, elle portait des ballerines, rouges également, tout comme ses petites ailes. Les Pixies n'utilisent presque jamais leurs ailes, sauf en cas d'urgence – ou de grande paresse.
     Il aurait été facile de penser que la journée qui commençait allait être ordinaire. Mais ça n'était pas le cas et Jamina, qui le savait bien, se mit en route. Aujourd'hui, les portes de Lilpourjinn, la cité haute de Lilpour, allaient s'ouvrir. En ce début du mois de septembre, comme chaque année, les aspirants ShadisPixies allaient faire leur rentrée et Jamina en ferait partie. Les ShadisPixies étaient les seules Pixies autorisées à aller dans le monde des humains et Jamina souhaitait depuis longtemps rejoindre ce clan très fermé. Elle savait qu'elle ferait ainsi la fierté de ses parents et cela la rendrait heureuse. Mais elle savait aussi que le chemin pour y arriver serait long et parsemé d'embûches et elle ignorait si elle en viendrait à bout. Pour le savoir il n'y avait toutefois qu'une seule solution. 

     Lilpour était une ville fascinante et immense, pourtant l'on n'y trouvait rien de plus que dans les autres grandes villes: commerces à foison, habitations innombrables, parcs, ruelles étroites... La pierre sèche ocre utilisée pour bâtir la cité accentuait l'impression de chaleur écrasante provenant du désert voisin. Mais Lilpour était aussi un paradis de fontaines de marbre blanc, où coulait perpétuellement une eau claire et fraîche. Une végétation luxuriante, composée de palmiers et de fleurs tropicales éclatantes de couleurs, avaient suffi à faire de Lilpour « le joyau du désert ». Mais pour Jamina, qui était née à Lilpour et n'avait jamais rien connu d'autre, elle n'était rien en comparaison de la ville haute, Lilpourjinn. Pour gagner cette dernière, il fallait traverser Lilpour jusqu'à atteindre la grand-place, un vaste espace dégagé au sol couvert de pierres blanches et nues, autour duquel mille et uns étals offraient leurs plus belles marchandises, dans le brouhaha incessant des cris des marchands, des exclamations des clients, des conversations des passants et parfois, des « au voleur! » des badauds les plus insouciants. Au fond de la grand-place, en direction du nord, un escalier de marbre blanc conduisait à une monumentale double porte en bois décoré de frises sculptées d'une grande finesse. Cette porte, gardée par des Pixies armés de sabres de guerre, était généralement parfaitement ignorée de la foule, qui n'avait souvent rien à faire à Lilpourjinn et n'osait de toute façon pas affronter la redoutable garde royale. Au-delà de la porte, Lilpourjinn était une merveille de verdure, de jardins d'agréments et de riches façades ornées de pierres précieuses. Chaque maison était comme un palais miniature et les rares marchands qui vendaient là leurs précieux articles avaient renoncé à les présenter sur de vulgaires étals, préférant déployer toute leur magie pour créer les vitrines les plus attirantes et les plus magnifiques. Lilpourjinn, contrairement à sa petite soeur la ville basse, n'était composée que de quelques rues, dont la plupart avaient la taille d'une avenue. Y retrouver son chemin était chose aisée, d'autant que la ville haute était parfaitement circulaire et que toutes les rues débouchaient au même endroit: la Place Royale.
     Nulle trace de palais sur cette place. Seule une vaste marche de marbre turquoise, de quinze mètres de côté, occupait tout l'espace. Pour voir le palais, il fallait lever la tête et espérer qu'il n'y aurait pas de nuage pour vous cacher la visibilité, ce qui était fort rare, car même si le ciel au-dessus de Lilpour était le plus souvent parfaitement dégagé, il en allait autrement du ciel de Lilpourjinn, généralement parcouru d'épais cumulus blancs. Mais quand les nuages se dissipaient... Quelle merveille! Quel spectacle pour les yeux! Les voyageurs qui découvraient la ville, comme les plus anciens habitants qui n'en étaient donc pas à leur première contemplation, tous se tordaient le cou pour voir l'imposant bâtiment de Shadurikiam.
     La première chose qu'ils remarquaient, c'était l'impressionnant tapis volant qui semblait soutenir à lui seul le poids de la construction toute entière. Composé de fils d'or, d'argent, et de coton de toutes les couleurs, il présentait sur des centaines de mètres carrés des motifs complexes, des insignes de toutes sortes, des scènes de combat de batailles épiques oubliées depuis longtemps, des frises de fleurs inconnues. Les franges de ses bords étaient de fils d'or dont chacun soutenait à son extrémité le poids d'une pierre précieuse: le saphir alternait avec le rubis, le cristal avec l'améthyste, l'émeraude avec le diamant. Au moindre souffle de vent, les pierres s'entrechoquaient dans un  tintement cristallin absolument divin. Mais le plus beau se trouvait en apesanteur, au-dessus de ce support improbable. Shadurikiam était une étonnante construction composée de dizaines de bâtiments circulaires de pierre blanche ou bleue. Le premier cercle était immense et l'on devinait à l'intérieur la présence de dizaines de salles, hautes comme des églises. Une galerie, dont les murs étaient comme de la dentelle de marbre blanc, entourait le premier cercle, permettant l'accès à une multitude de petites boutiques circulaires, comme autant de boules d'oxygène opaques en suspension dans l'air. Au-dessus du premier cercle, plusieurs niveaux de bâtiments circulaires bleus, possédant chacun leur propre galerie de pièces rondes, étaient reliés au niveau inférieur par toute une série de plate-formes, de galeries et d'escaliers qui s'entrecroisaient comme si une araignée géante avait tissé l'ensemble. Le troisième cercle enfin, immense, magnifique et de la taille de quatre cathédrales mises côte à côte, était rarement visible car le soleil éblouissait les curieux qui tentait de l'apercevoir et la nuit, la visibilité était nulle. Certaines légendes mentionnaient également l'existence d'un quatrième cercle, mais peut-être n'existait-il que dans les contes.
     Shadurikiam était une « chose » extraordinaire, presque indéfinissable, une merveille de magie aussi, car bien sûr tout le talent de construction des bâtisseurs Pixies n'avait pas suffi pour ériger un pareil ensemble. Les cercles concentriques, ornés de leurs petites dépendances rondes et blanches, le dédale des galeries dentelées ornées de bas reliefs, offraient au visiteur un spectacle que jamais il ne pouvait oublier et qu'il se promettait le plus souvent de contempler de nouveau le plus rapidement possible.

     Jamina en resta muette de surprise. Ce n'était pas la première fois qu'elle apercevait Shadurikiam, mais entre l'apercevoir et la contempler de près, il y avait une sacrée différence! Ses pas l'avaient menée jusqu'à la double porte de bois, et elle avait joué des coudes parmi la foule pour se frayer un chemin jusque là. Et maintenant, la bouche entrouverte, elle restait là, ne trouvant pas les mots pour décrire son émerveillement et ne trouvant pas plus la force de détacher son regard de l'imposante construction qui projetait sur elle son ombre bienveillante.

    - Tu ressembles plus à un poisson hors de l'eau qu'à une apprentie ShadisPixie, tu sais, dit une voix moqueuse à son oreille.

     Jamina se retourna d'un bond. Une Pixie d'environ son âge, avec de grands yeux noirs et de longs cheveux de la même teinte, se tenait devant elle. Elle était vêtue d'une longue robe bleu nuit sous laquelle étaient bien visibles un T-shirt et un sarouel blanc.

    - Candice!

     Jamina sauta au cou de son amie, heureuse de la retrouver. Candice était sa meilleure amie et la personne qu'elle préférait à Lilpour. Ensemble, les deux amies avaient choisi de s'inscrire à la fabuleuse école de Shadurikiam pour devenir ShadisPixies. Si Jamina n'était pas rassurée d'y aller seule, maintenant que Candice était là, elle n'avait plus peur.

    - Tu te sens prête? demanda-t-elle à son amie.
    - Plus que jamais! répondit Candice. Et toi?
    - Oui!

     Le visage éclairé par un sourire lumineux et la main serrée dans celle de son amie, Jamina se mit dans la file et attendit avec une impatience grandissante les tapis magiques de transport qui la conduirait, avec Candice, à Shadurikiam.

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